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Immobilier: la reprise des chantiers du bâtiment, enjeu majeur pour le gouvernement

Pour le gouvernement, la relance du secteur du bâtiment incarne une reprise économique vivement désirée, même si l’avenir du secteur reste incertain.

Crédit: iStock.

Bruno Le Maire a affirmé dès le premier jour du déconfinement, le 11 mai, que le bâtiment « est un secteur absolument vital pour l’économie française ». Le ministre de l’Économie et des Finances est même allé jusqu’à parler de « symbole du redémarrage économique français ». Ce lundi 18 mai sur Franceinfo, il a encore pris le bâtiment comme exemple lors d’une interview, déclarant qu’il existe « des secteurs où les choses s’accélèrent bien ». « Début mai, 45% de l’activité était à l’arrêt » dans le secteur, a-t-il précisé, contre « 28% aujourd’hui ». Pour les travaux publics, 80% des chantiers étaient stoppés au moment du confinement, 17% seulement à ce jour.

Des chiffres enthousiasmants déjà mis en avant dimanche 17 mai par le ministre de la Ville et du Logement, Julien Denormandie, qui a parlé lui de 72% des chantiers ayant repris. Le gouvernement souhaite qu’ils aient tous recommencé à la fin du mois de mai. Mais les professionnels du secteur sont plus prudents.

Le secteur du bâtiment pesait près de 11% du PIB en 2018

Le bâtiment représente plus de 5% de l’économie française. Cependant, en y ajoutant l’ensemble des services liés à l’immobilier, il pesait près de 11% du PIB en 2018, selon une étude « Real Estate & Urban Employment Monitor », datant de décembre 2019, réalisée par EY, la Fondation Palladio et Business Immo. Les services cités sont rendus par les architectes, les agents immobiliers ou encore les services immobiliers aux entreprises. Le secteur, au sens large, employait, selon cette étude toujours, près de 2,1 millions de personnes, c’est-à-dire 7,7% des actifs ayant un emploi.

La santé du secteur garantit une offre suffisante en logements, ce qui est essentiel au bon fonctionnement de toute l’économie. Cependant, son redémarrage dépend de l’attitude de ses trois grandes catégories de clients : les particuliers, les groupes privés et les acteurs publics (État et collectivités locales). Les groupes privés impliquent les promoteurs qui construisent les logements. Ils tentent encore d’appréhender l’avenir immédiat du marché.

Coup d’arrêt sur les permis de construire

Même si le gouvernement a pris des mesures pour assurer une reprise rapide de l’examen des permis de construire après le confinement, le coup d’arrêt pourrait se révéler brutal. Il n’y a plus de chiffres mensuels sur leur nombre depuis le début de la crise. Les promoteurs craignent des blocages, notamment en raison des incertitudes autour des élections municipales, interrompues entre les deux tours pendant le confinement.

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Le PDG du premier promoteur français avait déclaré début mai dans le Journal du Dimanche ne pas croire « à un retour à la normale avant la fin de l’année ». Alain Dinin, de Nexity, avait alors précisé que « pour la promotion immobilière, l’année 2020 sera en baisse importante, d’au moins 100 000 logements ». Il avait toutefois souligné que « la demande de logements, tirée par la démographie et le déficit d’offre structurel, ne disparaît pas : elle se reporte ».

Les particuliers pourraient abandonner leurs projets de travaux

Concernant les particuliers, plusieurs questions restent en suspens quant à leur souhait de réaliser des travaux chez eux, après des mois de chômage partiel pour certains, voire d’inactivité totale. « Les clients sont inquiets pour la suite », indique Patrick Liébus, président de la Confédération de l’Artisanat et des Petites Entreprises du Bâtiment (Capeb). « Certains ont fait des économies, mais d’autres ont tout perdu », souligne le président de l’organisation qui regroupe les artisans du bâtiment. Il parle notamment des commerçants, hôteliers, restaurateurs, qui ne « sont pas forcément en état » de faire des devis.

Du côté du secteur public, les inquiétudes de la profession sont semblables. La crise pourrait laisser les collectivités locales exsangues. Selon la Fédération nationale des travaux publics (FNTP), la crise pourrait coûter jusqu’à neuf milliards d’euros aux collectivités, notamment en raison de l’arrêt du marché immobilier, qui les a privées des impôts locaux. La FNTP parle déjà d’un « trou d’air » dans les appels d’offres. De nombreuses entreprises du secteur pourraient ne pas y survivre. Dans un communiqué fin avril, la fédération demandait le soutien de la commande publique locale, sans attendre les plans de relance, discutés une fois la crise sanitaire passée.